20 mois de crise du coronavirus engendrent une opposition aux mesures sanitaires, davantage de polarisation et de menaces

06/12/2021, Bruxelles –En mai 2020, l’Organe de Coordination pour l’Analyse de la Menace (OCAM) avertissait que la crise du coronavirus était un terreau propice à l’extrémisme. L’opposition aux mesures sanitaires a fortement augmenté ces derniers mois dans notre pays, ce qui conduit clairement à davantage de polarisation et de menaces.

Plusieurs manifestations et actions ont été organisées ces derniers mois pour protester contre les mesures sanitaires. Mais la manifestation d’il y a quinze jours – où plus de 30.000 personnes sont descendues dans la rue à Bruxelles – était étonnante. Pour la première fois, des organisations de diverses obédiences ont uni leurs forces pour critiquer la politique liée au coronavirus.

Qui constitue ce contre-mouvement ?

Le contre-mouvement est constitué d’un réseau diffus d’organisations impliquées dans les protestations, qui réussissent à s’imposer de plus en plus dans l’espace public. Ces organisations ne peuvent pas être classées sous un seul dénominateur. En tout état de cause, elles ne relèvent pas des courants idéologiques classiques suivis dans une perspective sécuritaire – à savoir l’extrémisme et le terrorisme.

La plupart d’entre elles portent sur la critique de l’approche politique, qui n’est pas problématique d’un point de vue sécuritaire. Elles ont été créées pour la majeure partie spécifiquement après le début de la crise du COVID-19.

Plus de 14 organisations ont officiellement participé à la manifestation du 21 novembre à Bruxelles, sous la bannière « Ensemble pour la liberté ». Aucune d’entre elles ne peut être qualifiée sans équivoque d’extrémiste, ni en termes d’objectifs, ni en termes de méthodes. Quelques-unes se situent néanmoins dans une zone grise.

On constate toutefois que des groupes extrémistes de droite étaient également présents à la manifestation. Plusieurs groupes ont mobilisé leurs membres et ont ainsi contribué au succès de la marche contestataire. Il est au moins plausible de dire que des acteurs extrémistes de droite ont tenté de canaliser et d’instrumentaliser cette manifestation.

Toutefois, les violences qui se produisent à la fin de telles manifestations ne sont généralement pas le fait d’extrémistes parmi les manifestants, mais d’émeutiers dont le seul but est de provoquer des débordements.

D’où vient ce mécontentement ?

Le plus grand dénominateur commun des groupes actifs au sein de ce contre-mouvement est le rejet – à des degrés divers – des mesures restrictives de liberté comme remède pour la crise. L’introduction du COVID Safe Ticket (CST) a certainement contribué à enfler le contre-discours, tout comme la promesse, finalement jamais tenue, d’un « Royaume de la Liberté ».

Les réseaux sociaux jouent un rôle considérable : les gens se retrouvent dans une « bulle idéologique », dans laquelle ils ne reçoivent que des informations qui confirment et renforcent leur vision du monde. La désinformation, les fake news et les théories du complot circulent allègrement dans la plupart de ces groupes. De nombreuses personnes pensent ainsi que les mesures nous font délibérément évoluer vers un État autoritaire ou une dictature. Il va sans dire que ce genre d’idées peuvent devenir problématiques, étant donné qu’elles minent la confiance accordée au gouvernement, aux médias et à la science.

Propos haineux et menaces

La protestation mène à des appels, des menaces et des propos haineux de plus en plus acerbes, ce qui engendre un climat d’agitation et de polarisation.  Les discours de haine à l’encontre des décideurs politiques, des médias et des virologues semblent donc devenir de plus en plus acceptés socialement, augmentant le risque que cela mène à un incident violent.

Dans le courant de l’année, quelques interventions ont déjà eu lieu auprès d’individus responsables de propos haineux sur Internet, dans le but de prévenir des actes plus graves, notamment des actes effectifs de violence physique.

À quoi doit-on s’attendre à l’avenir ?

En raison de l’apparition de nouveaux variants et de l’apparition de nouvelles contaminations, il n’est pas réaliste de penser que la crise sanitaire fera bientôt partie du passé. Et cela signifie potentiellement de nouvelles vagues, éventuellement assorties de nouvelles mesures.

La résistance face à ces mesures restrictives de liberté semble avoir considérablement augmenté ces derniers mois. Il reste difficile de prévoir si le « contre-mouvement » sera capable de maintenir cette dynamique et si celle-ci continuera de donner lieu à des processus de radicalisation, voire, à terme, à des actes de violence.

Les périodes précédant une nouvelle vague, qui donneront lieu à de nouvelles restrictions, semblent particulièrement susceptibles d’entraîner de nouvelles poussées de résistance. Un autre élément déclencheur pouvant accélérer les processus de radicalisation est le sujet de la vaccination obligatoire contre le COVID-19.  Les sensibilités et le discours autour de cette question sur les nombreuses plateformes en ligne sont très chargés émotionnellement, ce qui augmente également le risque de fortes contre-réactions.